28 déc. 2012

"C'est un voyage — on le commence ensemble
parfois à rebours
ces jours-là et nuit
on revient sur nos pas
Sont ensemble, à un moment     même lointain
je prends ce moment-là "

Fabienne Courtade, "Le même geste"

9 déc. 2012

les plis des vêtements
sont les mêmes
que les plis du paysage



Fabienne Courtade, "Le même Geste", 2012

26 nov. 2012



9h50
je me rappelle un poncho de grosse laine aux couleurs de l'automne, un résumé du paysage ou en abyme

16h27
le vent qui travaille dans les hauteurs a des raisons que je ne connais pas mais font du bien au potentiel esthétique



 le 2 novembre 2012, Rentilly
"Monostiques paysagers" de Jacques Jouet

15 nov. 2012

"Quand on marche
  dans les aubes
  d'un continent vieux
  il arrive
  que des ancêtres nous bousculent"

  

 Laure Morali, "La terre cet animal"

7 nov. 2012



"— Il y a des petites voluptés qui ont été pour nous, 
comme, sur les bords des routes, ces petits fruits de 
maraude, aigres, et qu'on aurait voulu plus sucrés."


A.Gide, "Les Nourritures Terrestres"

28 oct. 2012

"(...) nous ne sommes pas séparés de la vie au milieu
des buissons et des choses communes."

Henry Bauchau, "Nous ne sommes pas séparés" 2006.

9 oct. 2012

" — Dans une vapeur de chaudière, confirmées dans leur tranchant, des arêtes qui s'aiguisent ; dans la sueur de pierre et de métal, qui inventent un rasoir inexorable, le fil transparent et sombre de l'obsidienne, la nuit devenue couteau."

Roger Caillois "Minéraux", in "Pierres", 1970

27 sept. 2012


"Lui.— Un jour, dans ma chambre, je regardais une serviette posée sur une chaise, alors j'ai vraiment eu l'impression que, non seulement chaque objet était seul, mais qu'il avait un poids — ou une absence de poids plutôt — qui l'empêchait de peser sur l'autre. La serviette était seule, tellement seule que j'avais l'impression de pouvoir enlever la chaise sans que la serviette change de place. Elle avait sa propre place, son propre poids, et jusqu'à son propre silence. Le monde était léger, léger..."

Jean Genet, "L'atelier d'Alberto Giacometti"

17 sept. 2012


"Pour un rien, pour un rien à nique
au ciel, des fois la gravité.
Malicieuses."

Claude Favre, "Interdiction absolue de toucher les filles même tombées à terre"

10 sept. 2012

"Quelque part quelqu'un est chien et aboie à la lune


Quelqu'un est né chinoise et maintenant elle a dix-sept ans

Quelqu'un c'est une blonde et sa sœur est vive, véritablement pétulante

Quelqu'un son père est Highlander

Quelqu'un... et puis ça lui a retenti sur les reins et maintenant fini, il dit qu'il aime 

autant mourir à l'hôpital

Quelqu'un il a de grosse solives à sa maison

Quelqu'un, il veut encore un peu de crème. (...) "



Henri Michaux, "Quelque part quelqu'un"

27 août 2012


" _ Omar Khayyâm regarde les mouches la poussière
ivre de et pour rien si tu savais et en langue persane
devrais te lire ne pas ciller l'amour avaler boue mots
acte d'accusation avaler boire acte inchoatif boire plus
qu'un choix symptôme plus qu'une pensée acte en
quatrains pourquoi pas dont on dit que c'est poème "


Claude Favre, "Vrac conversations," 

19 août 2012

"Je suis un moment à secouer l'incrédulité bienheureuse où me plongent les biens élémentaires qui me sont rendus, la paix, la solitude, les bois, l'océan d'air, le vert, les ruisseaux."

Pierre Bergounioux, "Carnet de notes 1980-1990"

30 juil. 2012

"On sent la courbure de la terre. On a désormais les cheveux qui ondulent naturellement. On ne trahit plus le sol, on ne trahit plus l'ablette, on est soeur par l'eau et par la feuille. On n'a plus le regard de son oeil, on n'a plus la main de son bras. On n'est plus vaine. On n'envie plus. On n'est plus enviée.

On ne travaille plus. Le tricot est là, tout fait, partout.

On a signé sa dernière feuille, c'est le départ des papillons."

Henri Michaux, "La Ralentie", "Plume".

7 juil. 2012

"C'est un jour comme celui-ci, un  peu plus tard, un peu plus tôt, que tout recommence, que tout commence, que tout continue."

G.Perec, "Un homme qui dort"

27 juin 2012

"Il était une fois un homme roux, qui n'avait d'yeux ni d'oreilles. Il n'avait pas non plus de cheveux  et c'est par convention qu'on le disait roux.
Il ne pouvait pas parler car il n'avait pas de bouche. Il n'avait pas de nez non plus.
Il n'avait même ni bras ni jambes. Il n'avait pas de ventre non plus, pas de dos non plus, ni de colonne, il n'avait pas d'entrailles non plus. Il n'avait rien du tout ! De sorte qu'on se demande de qui on parle.
Il est donc préférable de ne rien ajouter à son sujet."

Daniil HARMS, "Faits Divers"
(7 janvier 1937) Cahier Bleu  n°10

14 juin 2012

"Il règne ici la paix qui succède aux profonds cataclysmes, quand leur souvenir même est perdu, et que le ciel de nouveau préhistorique pâture avec une lenteur innocente l'ampleur en fin de compte extatique du dégât.
L'être antérieur au temps contemple avec les yeux de ma tête, mes jambes le soulèvent et le transportent machinalement sur un remblai. J'y cherche en vain le soleil dans cette pulvérisation de la lumière, un peu plus dense au bout des rails aplatis vers le nord."

Jacques Réda, "Les ruines de Paris", 1977

4 juin 2012

" Deux sœurs à particule vivaient parmi les immondices."
                                          
"Remerciements posthumes à M.Emile Locati pour son don généreux à l'A.S.J.F.T.N."
                                        
"M.Patel nous signale que les branches de son prunier ont été si fortement courbées par l'orage qu'elles rejoignent sa rhubarbe.
Toute notre sympathie."
                                     
"Le savon de Marseille était en réalité un réveille-matin !"


Béatrix Beck, "En bref, Faits divers et avis"

26 mai 2012


"Trois vesces-de-loup poussées spontanément dans le pré de
M.Nantel forment un parfait triangle équilatéral. Nos félicitations
pour cet heureux présage."


Béatrix Beck, "En bref, Faits divers et avis"

15 mai 2012

"Je marche, dit Suttree.
Vous marchez, dit-elle. Mais vous ne savez pas où vous allez."

Cormac Mc Carthy, "Suttree"

30 avr. 2012


"-L'attente ? Vous l'attendiez donc ?
-C'est à dire...
-Ici ? Sur mes terres ?
-On ne pensait pas à mal.
-C'était dans une bonne intention.
-La route est à tout le monde.
-C'est ce qu'on se disait."

S.Beckett "En attendant Godot"

19 avr. 2012


"... tout cela recouvert par un entrelacs de ronces, d'arbres à papillons, d'ambroisies, d'orties et de chardonnerets et parcouru par une faune timide : lapins, canards, grenouilles dans les mares entre le périphérique et le bassin d'Aubervilliers, rats le long des voies ferrées, chats et chiens errants, hirondelles, pigeons, et même des renards — on retrouve de semblables arches de Noé sur les plates-bandes qui cernent les aires de repos des autoroutes : protégées de toute intrusion par le glacis de la circulation d'un côté et de hauts grillages de l'autre, ces jardinets constituent les dernières zones véritablement sauvages du monde occidental."

Philippe Vasset, "Un livre Blanc" 2007

6 avr. 2012

"Plusieurs aussi sont là, au beau milieu de leur époque, mais Carcasse particulièrement est au seuil, caresse du pied le seuil et se tient là, avec au visage une impression d'absence qui cloche beaucoup avec le reste."

"Alors Carcasse", Mariette Navarro, 2011

30 mars 2012

"Il y a un terrible gris de poussière dans le temps
Un vent du sud avec de fortes ailes
Les échos sourds de l'eau dans le soir chavirant
Et dans la nuit mouillée qui jaillit du tournant
Des voix rugueuses qui se plaignent
Un goût de cendre sur la langue
Un bruit d'orgue dans les sentiers
Le navire du cœur qui tangue
Tous les désastres du métier ..."


Pierre Reverdy, "Chemin Tournant", 1929

17 mars 2012

"Sans surprise, le terrain est déjà habité si on tient compte de l'épaisseur des choses. Comme toujours. Gardons à l'esprit ce qui grouille en dessous et occupons humblement la surface."


Denis Lachaud, "L'homme Inepuisable", 2011

7 mars 2012

"Est-ce une danse
Que nous infligent
Les mots, les couleurs ?

Non, car la danse
Se contente d'elle-même.

Nous deux
Nous voulons trouver."

Guillevic "Relier"

26 févr. 2012

"Ainsi le temps nous fait l'un pour l'autre Antigone
Non point l'âge mais l'âme en quête du royaume (...)"


H.Bauchau, Les Deux Antigone, 1982

17 févr. 2012

"DOUCE FRANCE, aux extraits naturels de plantes, sodium, aqua, glycerin, vaseline, alcohol, etidronic acid, benzyl salicylate, prunus, citronnellol, eugenol, petrolatium, ne pas avaler, ne pas laisser à la portée des enfants, éviter tout contact avec les yeux."


Philippe Adam, France Audioguide

8 févr. 2012

"Il y a eu ce moment je me souviens où je me suis dirigée vers le fleuve et me suis mise à marcher sur le chemin, et alors j'ai vu l'oiseau filer bas dans le ciel dans un sens puis dans l'autre et j'ai dû me dire que ça commençait, que là dans tout ce froid et ce gris et la solitude du chemin, comme sur la scène d'un théâtre dans la hâte et l'obscurité s'installent de nouveaux décors, calmement, à pas feutrés et venus d'on ne sait quelles profondeurs quelque chose prenait place."

Michèle Desbordes, "Les Petites Terres" 2008

1 févr. 2012

"Je me souviens d'avoir regardé l'oiseau, de m'être demandé ce que je faisais à une heure pareille sur un chemin où je ne venais jamais et ne m'étais pas même dit que je venais, n'ayant bientôt plus à voir dans le ciel bas, plombé, que les tours de la centrale, l'épaisse, lourde fumée blanche qui se mêlait aux nuages et le bois qui de ce côté longeait le chemin, cachant le village, les petites maisons basses par où j'étais venue, les jardins derrière les murs."


M.Desbordes, "Les Petites Terres" 2008

14 janv. 2012

"Ici et maintenant, là et ailleurs, on attend le bus. L'arrêt est devant le café. On sent la poussière. Le ciel est très bleu. L'air flotte. Il y a tous ces fils.

Route est là.

On est dehors. On est descendue du train, on attend le car. Les immeubles vont et viennent. L'air respire, il y a des souffles. Les portes s'ouvrent, les portes s'ouvrent partout, on passe, on passe."

Leslie Kaplan, "L'Excès-L'Usine", 1994