28 sept. 2010

28/09/10
"Ce sont les gendarmes qui ont amené
Rainer, l'Allemand. Il traînait dans
une gare, sans papiers, sans argent,
sans parler un mot de français.


Très grand, costaud, les cheveux
courts : on ne sait pas exactement
d'où il vient, quelque part dans l'ex-
Allemagne de l'Est.


De visage et de gabarit on dirait un
lutteur arménien ou turc mais il
n'est pas violent, peut être un peu
irascible.


Il boite légèrement et joue aux
échecs. On a déjà fait plusieurs
parties que j'ai perdues. Mais le plus
souvent il regarde la télévision ou se
tient des discours, seul, sous le
préau.


J'aime ses manières.


J'aime qu'il soit là, comme une
énigme. Et il le sait. Avec ses yeux et
ses mains. Dans les seules traces de
son être."


Thierry Metz, "L'homme qui penche"

17 sept. 2010

17/09/10
“J'avais accepté que coexistent des réalités diverses, deux au moins, et qu'il n'y ait pas de passages.
 J'inventais la folie mais je tenais sur mes pieds, et présumais de mes forces.”

Marie Cosnay, "Villa Chagrin"

10 sept. 2010

10/09/10
"17 août. Huit heures. — Louis arrive avec le camion. On charge les décombres, les pierres.
On range les bois : planches et madriers. Le Corps a vite chaud. On s’arrête un instant.
Pour souffler. Pour regarder ce qu’on a fait. Et ce qui reste. On bavarde. Nos voix sont en sueur.
Louis s’éponge avec un mouchoir de grand-mère,immense et brodé d’initiales, qui sent la cendre et la pluie.
On écoute ce qui a lieu dehors, ce qui passe. Puis très vite : tout devient silence, tout devient geste. On n’entend plus que nos pelles qui raclent l’inépuisable."


Thierry Metz, "Le Journal d’un Manœuvre

3 sept. 2010

3/09/10

On passe d'une chose à l'autre. Très vite. Pas

moyen de s'arrêter une seconde pour désigner le

nuage. Et plus loin : les violences. Personne ici

ne pourrait parler du feu. Tout reste entre nous.

Jamais dit.

On n'est convié à rien puisqu'on n'a pas de

mots.


Que des outils...

C'est tout.


Ecris ton poème maintenant.



Thierry Metz, "Le journal d'un manœuvre".