28 déc. 2010

28/12/10
"Préférer la nuit. Préférer le bateau du soir, l'appareillage en gare maritime de Naples, la trace d'une route vers le sud, huit heures d'affilée, régime à quinze nœuds, navire vaillant sur son erre, préférer le souffle des machines, la puissance des moteurs, préférer la vitesse, le vent dans la bouche, les cheveux chassés sur les fronts limpides, les yeux qui brillent et le monde comme un disque au cœur duquel se placer soi, éventé et droit comme un I, l'abdomen en chambre d'écho, la peau nue et d'autres yeux derrière la tête, soi-même donc, à poste, centreur mécanique pour que tout cela tourne, tourne, tourne. A l'aube, tout de même, déballonner le torse et ralentir un peu."

Maylis de Kérangal, "Sous la cendre" (Ni Fleurs ni couronnes)

13 déc. 2010

13/12/10
“Transformer la vue imparfaite qu'on a de cette fenêtre en petit paysage idéal, ne laisser qu'un seul arbre par champ, une maison est un simple cube, etc., les lointains sont rendus par la perspective aérienne, un pré miniature est entouré de haies, couvertes de treilles entrelacées, à chaque coin, la forme trapézoïdale au fond rend ce pré presque vertical à l'œil, devant les animaux agrandis familiers importants, lapins fluo au repos, patte repliée, oreille paresseuse, rêvant à un grand champ pour lui tout seul, 50% luzerne, 50% trèfle, entouré d'un bonne clôture enterrée anti-renard, une source surgit au beau milieu, entre deux grosses pierres, il fait beau."

Olivier Cadiot, "Retour définitif et durable de l'être aimé"