14 mars 2024

Basculer dans la cerce

 



Basculer dans la cerce. Attaquer juste au-dessus du bloc coincé dans le couloir menant à la brèche N. S'élever jusque sur le surplomb. Traverser à gauche sur une vire oblique. Se diriger vers la niche grise. Rejoindre la partie supérieure de l'arête SE. Rejoindre l'éperon, gagner le tout petit dièdre. Prendre l'oblique à droite puis la verticale. S'élever sur une langue de neige. Aborder l'éperon gauche. Escalader en zig zag. Arriver devant une fissure étroite dans le mur jusqu'à l'antécime W. Contourner les blocs instables. Remonter un couloir de roches brisées, barré par un bloc surplombant. Rejoindre l'arête ENE. Attaquer la partie gauche de la facette et monter vers la branche SE. Escalader par le fil de l'arête. S'élever par un couloir-cheminée. Éviter le couloir délité. Grimper en écharpe à gauche. Suivre le sillon creusé en L. Gagner l'arête qui le borde. Longer la petite paroi rouge verticale.

Véronique Vassiliou, "Mû"
éditions Nous, 2021.


10 janv. 2024

J'ai aussi l'impression de trébucher souvent



 

J'ai aussi l'impression de trébucher souvent, que mon corps est bousculé par les autres bousculé par moi. Je tourne la tête trop vite, mon bras ne voulait pas aller si loin, mon pied est en déséquilibre dans le brouhaha des corps bien en place qui m'entourent. Il faut tellement d'acceptation de soi, des autres et de l'espace pour que ça marche un corps, que ça ne subisse pas le réel mais que les gestes l'habitent paisiblement, avec la bonne tension. Les animaux sauvages, eux, ne connaissent pas la maladresse. Le léopard ne se pose pas la question de sa démarche, le vol de l'aigle n'est jamais ridicule, les sauts du chevreuil sont toujours coordonnés. Leur corps n'échappe jamais à leur contrôle alors qu'il me semble parfois qu'il faudrait toute une vie pour apprendre à ne pas rougir quand je cours dans la rue et à marcher tranquillement sur le chemin vers la mer.

Victor Pouchet, Autoportrait en chevreuil, éd. finitude, 2020