29 déc. 2017

chapitre xx

Des vêtements et de leur nudité

Leur nudité est double ils cherchent attentivement des 
traces de soi, des différences plus solidement installées 
qu’entre deux chaises. Car s’ils portent une peau de bête, 
ils n’en demeurent pas moins dénués de honte, de dis-
simulation ou de déguisement. Une contradiction dans 
la loi épingle de petits tabliers sur leurs femmes à la 
naissance, génitif nu du prix d’achat, pour faire peur à 
l’imagination. Leur seconde nudité dégaine un manque 
de feuillage, mais quelques noms de plantes ne peuvent 
déranger la conclusion générale à la façon dont le velours 
le fait pour nous.

dessus
dessous 
volant
rabat
peau




Rosmarie Waldrop, "Clef pour comprendre la langue de l’Amérique"
(Trad. Paol Keineg), éd. Héros-limite, 2013 

5 déc. 2017

(…)

"Alors,
j’ai senti les buissons
dans mon ventre,
les renards dans mes seins,
les pieuvres dans mon cou,
les orties,
les graviers.

J’ai senti le volcan.

Alors,
j’ai senti les épines
et les ronces.

J’ai senti la forêt.

Les prairies de mon ventre.

Alors,
je me suis assise
et la nuit est venue sur moi.
Et la nuit m’est venue de face.
Et la nuit m’a cassé les yeux.

Alors,
je me suis couchée
et la nuit n’a rien voulu dire."


Laura Vasquez, "La Forme de ma forêt" (extrait), dans "La Main de la main"
éd. Cheyne (prix de la vocation) 2014.